Vers le Dimanche 15 mai 2022
Vers le 5°Dimanche de Pâques – Année C

Le dernier repas de Jésus avec ses disciples est un moment unique dans l’histoire. On le sait, dans les évangiles, Jésus nous est souvent montré à table ou participant à un repas : repas de fête lors de son premier « miracle » à Cana, repas avec des pécheurs comme Zachée ou chez les pharisiens, sans parler des différentes agapes champêtres lors des multiplications de pains et de poissons. Pour Jésus comme pour nous, beaucoup de choses se passent à table. Lieu d’intimité, de partage et aussi de conflit en famille ou entre amis. Je remercie le Seigneur pour sa manière simple et conviviale de se faire proche. Et je décide de soigner les repas et les liens de ce jour.

C’est tout de même un drôle de repas. Au moins trois raisons à cela. Premièrement, c’est le repas rituel de la Pâque et une certaine solennité transparait. Deuxièmement, l’ambiance est lourde : Judas est sorti pour mettre en œuvre son projet de trahison. Troisièmement enfin, Jésus formule son testament en livrant le cœur de son message : aimer. Je m’imagine à table avec les disciples. Je me rends attentif à ce qui se dit entre eux, à ce qu’ils font, à leur désir de comprendre ce que Jésus exprime avec tant d’émotion.

Le mot « glorifié » ou « gloire » revient 4 fois dans ce passage et il est employé par Jésus autant pour lui-même qu’à propos de son Père. C’est un mot que l’on utilise à la messe (« Gloire de Dieu au plus haut des cieux… ») ou dans des prières familières (« Gloire au Père, au Fils… ») mais que signifie exactement ce mot ? La gloire – en hébreu « kâbod » – désigne ce qui a du poids, ce qui en impose. Rendre gloire à Dieu, c’est donc reconnaître sa puissance vivifiante. Mais comment Jésus peut-il parler de gloire dans un moment si dramatique ? Je rends gloire à ce Dieu qui dit sa force dans la faiblesse et qui me la donne à contempler sur la Croix.

Jésus invite ses disciples – donc nous aussi – à aimer comme lui nous a aimés. C’est dire l’exigence inouïe de sa demande. Qui peut aimer comme Jésus a su le faire ? Qui se sent capable d’aimer ses ennemis ou de chercher à se rendre proche de ceux qui sont loin culturellement, religieusement ou socialement ? Au lieu de nous culpabiliser, voyons cette invitation comme l’occasion de grandir dans nos relations en faisant un pas après l’autre. Aujourd’hui, je choisis de me rendre le « plus aimant possible » pour ceux que je vais rencontrer en « présentiel » ou par les moyens numériques.

Aimer, cela ne se commande pas dit-on. Mais aimer n’est pas non plus affaire des seuls bons sentiments. C’est une décision à prendre, une détermination à nourrir chaque jour car dès notre plus jeune âge, le plus facile est souvent de « s’embrouiller » avec les autres ou de tenter de minimiser leur droit à la différence. Je peux dessiner un « panorama de mes relations ». Sur une feuille je note le nom des gens que je côtoie ou que j’ai côtoyés récemment. Dans une colonne à gauche de la feuille, je place ceux avec qui c’est facile d’être en relation et dans une colonne à droite, les autres. Je confie les uns et les autres au Seigneur.

Ceux dont j’ai noté le nom hier sur ma feuille, je choisis de les regarder comme Dieu seul sait les regarder. Ainsi j’essaie de voir en premier leurs talents et leur valeur, sans d’abord me focaliser sur leurs défauts et leurs manques qui me blessent. Aimer exige humilité et humour, surtout que je suis sans doute placé dans la colonne de droite sur la feuille de certains autour de moi ! Aimer comme lui, c’est la grâce que je demande au Seigneur durant ce jour.

« Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c’est l’amour que vous aurez les uns pour les autres. ». Cet amour que Jésus nous demande d’avoir possède une dimension pleinement missionnaire. Seul l’amour parle bien aux autres du Dieu de l’Evangile, bien plus que des savoirs ou des discours sur lui. Dans le même sens, un grand théologien aimait répéter : « l’amour seul est digne de foi ». Cela signifie que croire, c’est donner foi à une personne que l’on aime et c’est vivre cet amour déjà entre nous. En ce temps pascal, demandons la grâce de devenir des disciples plus attachés à ce Seigneur ressuscité qui n’a pas hésité à donner sa vie pour nous par amour. Et trouvons les moyens de la charité et de l’hospitalité pour rejoindre les plus fragiles et les plus délaissés de notre monde et de nos familles.