Vers le Dimanche 09 février 2025
Vers le 5° Dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Plantons le décor de l’évangile de cette semaine : une foule, un homme. Elle se presse autour de lui : elle est donc nombreuse, bigarrée et compacte. Un rivage : celui de la mer de Tibériade, le lac de Génésareth. Une grande étendue d’eau, regorgeant de poissons si bons à manger. C’est le lieu de travail d’hommes qui vivent de la pêche et nourrissent les foules. Il y a des barques près du rivage. Que fait la foule ? Elle écoute la parole de Dieu, écrit Luc. C’est quasiment une liturgie de la Parole dans une église en plein air. Je me glisse dans cette foule. Je me presse pour écouter la parole de Dieu. N’est-ce pas cela, prier ? J’écoute.

Comment se faire entendre d’une foule, en plein air, sans micro et sans hautparleur ? Jésus ne veut pas crier, encore moins « gueuler ». Il désire enseigner, se faire entendre de chacun, entrer en conversation. Alors, il voit deux barques, monte dans l’une, demande au propriétaire de s’éloigner un peu. Il parlera de là, assis, et sa voix ricochant sur l’eau sera audible. Je regarde Jésus prendre les moyens de son temps pour que je puisse l’entendre. C’est lui qui facilite la relation. N’est-ce pas cela, prier ? Tu facilites.

C’est drôle : Luc écrit que Jésus finit de parler (à la foule) mais qu’il parle aussitôt à Simon, le propriétaire des barques. Jésus est vraiment parole de Dieu : il peut enseigner une foule et engager ensuite la conversation avec un petit groupe. Il le fait en invitant : « avance », « jetez ». Il le fait en prenant au sérieux un métier : la pêche. J’entends la manière dont Jésus entre en relation personnelle. Il invite au large. N’est-ce pas cela prier ? J’avance.

Simon appelle Jésus « Maître ». Sans doute a-t-il écouté comme la foule l’enseignement et s’est-il rendu compte que c’est un maître qui parle. Il ose lui faire part de ses objections, mais choisit la confiance. J’entends la réaction de Simon et son audace (« sur ta parole » et non sur mes doutes à moi basées sur mon expérience). N’est-ce pas cela prier ? Sur sa parole.

Au rien des peines de la nuit, succède le trop-plein du « sur ta parole ». Les filets sont sur le point de se rompre. Les autres viennent aider car Simon est dépassé. Les deux barques s’enfoncent. Je contemple les filets, les poissons, les barques, les compagnons qui viennent à la rescousse. Excès, surabondance, débordement, surprise… N’est-ce pas cela prier ? Tu combles.

« A cette vue », Simon panique. Il ne sait pas trop qui se tient devant lui, mais se doute bien qu’il vient de Dieu, le tout-autre, celui devant lequel nul ne peut se présenter sans défaillir. Qui est-il, lui Simon, pour être estimé suffisamment digne de se tenir devant Lui ? C’est trop énorme : « éloigne-toi de moi ». Se trouver ainsi mis en présence de Dieu a de quoi effrayer. Une telle proximité avec Dieu est impossible quand on n’y est pas préparé. Pourtant… N’est-ce pas cela prier ? Me voici.

La rencontre de Jésus avec Simon (et ses compagnons) raconte comment nous sommes en relation avec Jésus. Il y a comme une signature qui se reconnaît : la centralité de la parole, son efficacité si nous agissons en nous appuyant sur elle, l’abondance du don de Dieu, l’effroi qui nous saisit quand nous en sommes témoins, l’apaisement donné (« sois sans crainte »), et, pour finir, la promesse faite (pour Simon, « ce sont des hommes que tu prendras »). Pas tant un changement de métier (Simon reste pêcheur) qu’une réorientation de vie : suivre celui qui déploie en nous et autour de nous la vie. Au large !