Vers le Dimanche 05 novembre 2023
Vers le 31e Dimanche du temps ordinaire – Année A

Pourquoi Jésus est-il si souvent sévère avec les scribes et les pharisiens ? Il pourrait nous répondre ceci : « A qui l’on a beaucoup donné, on redemandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage » (Lc 12, 48). En effet les scribes et les pharisiens connaissent mieux que quiconque la loi de Moïse. Or cette loi devrait les conduire au service humble de Dieu et du prochain, et non pas à la recherche des honneurs. Jésus m’invite à regarder de près mes façons de faire, car je peux parfois me sentir supérieur aux autres à cause de mes engagements en Église ou de mes connaissances sur notre tradition. Je demande la grâce d’être plus ajusté dans mes relations.

Jésus ne remet pas en cause l’enseignement de Moïse : il n’est pas venu « abolir la loi mais l’accomplir » (Mt 5, 17). Néanmoins il dénonce une manière de l’instrumentaliser. Hier comme aujourd’hui, les contradictions ne manquent pas dans le monde de la pratique religieuse et elles se transforment vite en contre-témoignages. Les actions que Jésus pointe – élargir les phylactères, préférer les places d’honneur, le titre de Rabbi – nous guettent aussi. Quels gestes je pose, seul ou avec d’autres, pour me faire remarquer par les autres ? Je demande la grâce de l’humilité.

En ce jour de fête, l’Eglise nous invite à rendre grâce pour tous les amis de Dieu qui à travers les âges ont vécu en grande cohérence de vie et de cœur avec Dieu et leur prochain. Ils n’ont jamais cherché à prendre les premières places ou à se faire appeler maîtres. Le texte des Béatitudes qu’on entendra aujourd’hui est une invitation à imiter le « style » de Jésus, style qui a inspiré et nourri l’existence de tous ces saints. Par leur intercession, je demande la grâce d’être un peu plus miséricordieux, doux et artisan de paix dans les actions et les rencontres de ce jour.

Au lendemain de la Toussaint, l’Eglise se fait pleine de compassion pour toutes celles et tous ceux qui nous ont précédés dans l’histoire, dans notre histoire. Certains sont connus, d’autres non. Certains sont proches, d’autres pas du tout. Certains semblaient connectés à Dieu, d’autres beaucoup moins. Qu’importe ! Tous ont besoin d’être confiés à la Miséricorde du Seigneur. Je choisis de faire mémoire d’une manière particulière de celles et ceux qui me manquent en écrivant leurs noms sur un papier à déposer par exemple dans une église ou dans mon coin prière. Je pense aussi à celles et ceux qui sont seuls au moment du passage ou qui perdent la vie à cause de la bêtise et de la violence humaines.

Il n’est facile pour personne d’être « congruent », c’est-à-dire de faire correspondre ses paroles et ses actes. Ne jugeons donc pas trop vite les scribes et les pharisiens qui sans doute pour la plupart faisaient de leur mieux. Mais Jésus les invite, eux comme nous, à aller plus loin. Son invitation est exigeante : « le plus grand parmi vous sera votre serviteur ». Cela nous fait penser à la dernière Cène où Jésus, le Maître par excellence, dépose son vêtement et lave les pieds de ses disciples. Je lui demande la grâce de faire et d’être comme lui et de devenir jour après jour un humble serviteur.

Dans notre tradition, on appelle souvent « pères » les prêtres et les religieux. Si les aspects affectueux et respectueux sont tout à fait louables, ce titre peut susciter un certain esprit servile et des jeux de pouvoir indignes de l’Évangile. Et c’est peut-être difficile à entendre, ces titres alimentent les inégalités et les risques d’abus. Nous sommes invités à plus de vigilance entre nous. Je confie au Seigneur celles et ceux – car ce n’est pas une tentation exclusivement masculine – qui recherchent un titre ou une position en oubliant que seul Dieu est Maître.

Trois ans déjà depuis « Fratelli Tutti », l’encyclique du Pape sur la fraternité. Son texte, dans une année marquée par la pandémie mondiale, faisait précisément écho aux mots de Jésus dans l’évangile de ce dimanche. C’est bien en reconnaissant que nous n’avons qu’un seul Père qui est Dieu et qu’un seul Maître qui est le Christ que nous découvrons progressivement que nous sommes « tous frères ». Et cette expérience de la fraternité nous fait entrer dans une conversion à la fois personnelle et communautaire. La fraternité nous rend serviteurs les uns des autres, compatissants avec les plus fragiles, et vigilants vis-à-vis des dérives de pouvoir dans toutes les relations que nous tissons en particulier dans nos communautés. Que l’Eucharistie dominicale nous aide à comprendre ce « tous frères » et fasse de nous des artisans de cette fraternité joyeuse que Jésus veut pour notre humanité blessée.