Aujourd'hui, nous avons le plaisir d'être avec Yoanna Rigotto. Tu habites dans un village près de Castres, dans le Tarn, tu es mariée, et tu as deux enfants. Tu es chrétienne et tu fréquentes une église protestante évangélique, ce qui te permet de nourrir tes engagements, tout d'abord, ton engagement professionnel, en tant que coordinatrice du réseau d'ambassadeurs A Rocha, mais aussi ton engagement personnel en tant qu'auteur du blog La famille verte.
Pour commencer, on va te poser la question qu'on pose à tous nos invités, est ce que tu peux nous raconter ton itinéraire de conversion écologique
Alors j'ai toujours eu, depuis toute petite, une sensibilité pour l'environnement. Sauf que je ne connais pas bien la nature et je ne connais pas le nom des arbres, des insectes. Mais j'ai grandi à la campagne et j'étais habituée depuis toute petite, par exemple, à faire le tri des déchets, à éviter le gaspillage alimentaire par exemple.
Mais voilà, ça s'arrêtait là au niveau de l'engagement pour l'environnement. J'appréciais la nature, être en contact avec elle, l'admirer. Mais ça n'allait pas plus loin. Par contre, depuis une dizaine d'années, j'ai regardé de nombreux documentaires qui mettent en avant l'impact de nos sociétés industrialisées sur l'environnement. Et puis sur la santé aussi. Alors, beaucoup de sujets y sont passés. Mais je me souviens en particulier de certains documentaires qui dénoncent les travers de l'industrie alimentaire. Il y avait aussi ceux qui montrent les dégâts des plastiques dans l'océan et il y en avait en particulier aussi sur les impacts sociaux et environnementaux de la mode. Je me souviens de ce documentaire s'appelait The Truth Cost et il y avait aussi des documentaires plus généralistes, comme la série Vue du ciel de Yann Arthus-Bertrand. Ce documentaire montre des images fascinantes de notre belle planète, mais il alerte aussi sur les vices que les activités humaines lui font subir.
Et en fait, en voyant ça, l'ensemble de ces documentaires, en quelque sorte, préparait un terreau en moi pour agir, pour me dire « Ah bah, je peux faire quelque chose. On ne peut pas rester comme ça, c'est pas possible. » Mais je ne savais pas encore quoi faire concrètement à ma petite échelle. Je pensais que l'action était réservée aux gouvernements ou aux industriels.
Et un jour, il y a environ quatre ans, en libérant un pack de lait de son emballage plastique destiné à la poubelle. Je revenais des courses, j'ai vu ça, et je me suis dit « C'est quand même fou tout ce qu'on peut jeter alors que ça a si peu servi. » Et alors, à partir de ce jour-là, j'ai décidé de chercher des solutions pour réduire la quantité des déchets ménagers produits par ma famille.
Je m'en suis d'abord pris au yaourt. J'ai commencé à faire mes yaourts moi-même avec une yaourtière et après j'ai découvert plein d'autres choses, plein d'autres manières de diminuer les déchets. En fait, c'était tout simplement la démarche du zéro déchet que j'ai découverte et en appliquant ces principes, je me suis mise à examiner toutes nos habitudes de consommation, d'abord au niveau de l'alimentation, mais aussi au niveau des produits ménagers ou des cosmétiques.
Après les vêtements, puis le numérique, puis ça allait bien au-delà avec les transports, le jardin et tout ce qu'on peut faire dans nos modes de vie.
Mais vraiment, le point de démarrage, c’est parti de la volonté d'éliminer les emballages plastiques. Vous savez tout ce qui est blisters, barquettes etc. Alors pour ça, au niveau de l'alimentation, il y a les achats en vrac. Mais dans les autres domaines, par exemple les vêtements, les produits de consommation qui durent un peu plus. En fait, on a pris l'habitude avant d'acheter quelque chose, de vérifier si on ne pouvait pas plutôt le trouver d'occasion. Ça marche pas mal pour les jouets des enfants. D'ailleurs. Et même avant d'acheter d'occasion, d'ailleurs, on s’assure que notre besoin est réel. Et on voit si un prêt ou une location pourrait nous permettre d'éviter l'achat.
De même aussi pour limiter les déchets liés aux consommables. Je pense aux cosmétiques, aux produits ménagers. J'ai cherché des solutions en testant des recettes. Dans certains cas, on peut très facilement fabriquer son produit avec peu d'ingrédients. Par exemple, je fais mon dentifrice moi-même. Par contre, j'ai choisi de laisser de côté les recettes trop compliquées pour lesquelles on a plus d'emballages, d'ingrédients que si on avait acheté le produit tout fait.
Et puis, en plus de nos jours, on trouve de plus en plus de cosmétiques et de produits ménagers en vrac, donc c'est plus simple comme ça.
Une fois que j'avais bien exploré les domaines de l'alimentation, des cosmétiques, des produits ménagers et de la consommation en général, je me suis demandé qu'est-ce que je pouvais faire dans d'autres domaines qui ont un impact écologique ?
Alors là, c'était plus forcément seulement lié aux déchets. Mais je pensais aux émissions de carbone. Et là, par exemple, j'ai pensé aux transports j'ai réfléchi aussi à la biodiversité. Et là, j'ai pensé à la gestion de mon jardin. Et en fait, c'est comme ça qu'on a exploré tous les domaines de notre mode de vie pour faire des adaptations.
Alors là, je tiens à préciser que notre démarche est loin d'être aboutie. On a encore plein de progrès à faire, mais c'est le chemin qui est important. Aussi, au fil de mes découvertes, j'ai souhaité mettre par écrit ce que j'apprenais parce que j'ai passé beaucoup de temps à lire, à continuer à me documenter, à faire des recherches sur Internet. Donc j'ai voulu écrire ces découvertes et les partager à mon entourage. Et c'est comme ça que naît mon blog lafamilleverte.fr J'ai écrit des articles très pratiques sur différents aspects d'un mode de vie plus écologique. Mais il y a aussi quelques articles de fond dans lesquels je cherche à mieux comprendre la situation écologique et l'impact de nos modes de vie actuels sur la planète. Et en faisant ce travail là, j'ai remarqué aussi des liens entre ma foi chrétienne et mon parcours de transition écologique. Donc, j'ai décidé de commencer à rédiger des articles sur le lien entre foi et écologie en m'appuyant sur les enseignements de la Bible. La Bible parle de prendre soin du jardin et parle aussi des effets du péché sur l'humanité et sur toute la création. La Bible incite à la sobriété, au contentement, à aimer Dieu et son prochain. Et en fait, toutes ces choses font écho à notre démarche de transition écologique au quotidien. Aujourd'hui, j'ai eu le privilège de travailler pour l'association « A Rocha France », qui œuvre pour la protection de la nature et la mobilisation des chrétiens. Et ça, ça me permet de donner un écho plus collectif et global à mon engagement personnel. Ça complète tout ce que j'ai pu mettre en place au niveau du mode de vie.
Pour A Rocha, je suis coordinatrice du réseau Ambassadeurs. Les ambassadeurs A Rocha sont des chrétiens qui sont sensibles à l'écologie et qui ont envie de s'engager pour le soin de la création au quotidien. Du coup, je m'occupe de coordonner ce réseau, c'est à dire que je me charge du recrutement de nouveaux ambassadeurs, je contribue à leur formation en organisant des webinaires, ouverts à tous, et aussi en organisant des zooms de formation complètement réservées aux ambassadeurs. Je m'occupe également de la rédaction de différentes ressources auxquelles ils ont accès. Je gère également le suivi de leurs interventions, puisque les ambassadeurs interviennent dans les églises pour faire des actions de sensibilisation. Ils interviennent aussi dans des évènements chrétiens, des festivals, des rassemblements d’unions, etc.
Et donc, je les accompagne pour se préparer en amont, que ce soit un accompagnement matériel ou leur préparation sur ce qu'ils auront à dire, sur l'atelier qu'ils vont animer etc… Et je fais le suivi également après l'intervention. Voilà, c'est à peu près le résumé de mon travail de coordinatrice du réseau.
Est-ce que tu pourrais nous parler la manière dont on peut entamer une démarche zéro déchet si on en est au point zéro, avec une consommation moyenne de déchet plastique à usage unique par exemple. Par où est ce qu'on peut commencer ?
Alors pour débuter, on peut commencer en s'appuyant sur la démarche des cinq R, petite précision il y a plusieurs mots possibles pour les cinq R. Moi, je vais présenter ceux qui me semblent faire le plus sens.
Le premier R, ça va être refuser. L'idée, c'est que moins on fait entrer d'objets à durée de vie très courte chez nous, moins on produit de déchets. Il y a énormément de choses que l'on peut refuser. Par exemple, tous les objets promotionnels offerts par les magasins, les petits « googies » comme on les appelle, les sacs plastiques bien-sûr, les objets à usage unique, les publicités dans la boîte aux lettres, etc. Là, en fait, il s'agit d'apprendre à repérer ces choses-là et tout simplement à dire non, à trouver les moyens de dire non.
Le deuxième R, ce sera le R de réduire. Alors là, l'idée est de réduire au sens large. On va réduire notre consommation générale. Le but, vraiment, c'est de lutter contre la surconsommation et aussi de lutter contre le gaspillage sous toutes ses formes. Par gaspillage j’entends, aussi gaspillage alimentaire qui est encore trop présent. Donc, en faisant attention à réduire fortement, on aura moins d'impact et à terme, on aura moins de déchets. Pour réduire, on peut penser aussi à « réduire les achats neufs ». Je ne parle pas d'arrêter de consommer complètement. On a tous des besoins. Parfois on a besoin de racheter des choses, par exemple quand les chaussettes sont trop usagées, il faut bien les changer, mais on peut quand même énormément réduire. On est dans des sociétés encore très consommatrices et chacun peut examiner ses besoins et voir comment il peut faire cette réduction d'achats neufs. Dans réduction, il y a aussi « réduire les emballages ». Alors là, on pourrait aussi le mettre dans refuser. Refuser les emballages, ça marche un petit peu ensemble, mais je vais mettre réduire parce qu'on ne peut pas acheter tous ces aliments sans emballage. Ce n'est pas encore possible, mais il y a quand même beaucoup de choses qu'on peut acheter en évitant pas mal de cartons d'emballage plastique, même d'emballages de verre.
Et pour ça, j'invite les gens à faire leurs courses en vrac. Rapidement, pour faire ses courses en vrac, il faut pouvoir réunir plusieurs contenants. Des bocaux, des boîtes de boîtes alimentaires. Ça peut être des boîtes en fer ou des boîtes en verre type boîtes à lunch. On peut réunir des sacs en tissu de différentes tailles, et puis des choses toutes simples comme des cagettes ou des grands sacs. Ça, ça marche bien pour les fruits et les légumes.
Ensuite, il va falloir trouver un endroit où on peut faire ses courses en vrac. Alors les fruits et les légumes, ça peut être très facile chez le primeur ou à la ferme, directement ou sur les marchés. On peut arriver avec une cagette, on met les choses directement dedans, ça va.
Pour tout ce qui est épicerie, là, il faut trouver des commerces spécifiques. Il y a de plus en plus d'épicerie, justement, de petites supérettes, tout petits supermarchés qui commencent à proposer la vente en vrac. Un petit bémol attention, il y a des gros supermarchés qui proposent du vrac, c'est très intéressant, mais certaines mettent les choses en vrac, mais on doit les prendre dans les sachets qu'ils proposent eux, ce n'est pas du vrai vrac. Et aussi attention à d'autres qui proposent des choses en vrac qui en fait à la base, sont conditionnés dans des sachets assez petits, donc ce n'est pas du vrac non plus. Voilà, ça, c'était un aparté. Mais sinon, on a beaucoup de magasins bio ou de petites coopératives qui proposent du vrai vrac.
Donc là, on y va avec nos contenants. Et avant de remplir nos contenants, on n'oublie pas de faire la tare, peser le contenant vide pour éviter après d'avoir à le payer. Parce que sinon, ça fait cher les pâtes. Si on met les pâtes dans un bocal en verre, le verre est un petit peu lourd.
Voilà, ça, c'était l'essentiel pour les courses en vrac.
Je vais passer du coup au troisième R, réutiliser. Pour cela, on les entretient, on en prend soin, si c’est en panne, on répare. On retrouve ce réflexe de réparer qui a un petit peu disparu en ce moment. Mais voilà, de plus en plus de gens prennent conscience que pas mal de choses sont réparables et on peut trouver les pièces pour arranger les choses. Il y a beaucoup de sites Internet aussi qui nous expliquent comment réparer les choses, donc ça, c'est intéressant. Quand un objet ne sert plus à son usage habituel et qu'il n'est pas réparable, ou on peut lui inventer un nouvel emploi pour augmenter sa durée de vie. Alors là, c'est sûr, ça va nécessiter un petit peu de créativité. Mais j'ai vu passer sur Internet de multiples idées, par exemple pour les tissus usagés. L'autre jour, j'ai vu u tapis de salle de bain qui a été fabriqué avec plein de chutes de tissus. En fait, les tissus étaient découpés en petites bandelettes qui étaient nouées sur une espèce de trame et ça faisait un super tapis de salle de bain. Il y a plein plein d'idées sur Internet pour réutiliser les tissus, réutiliser d'autres objets. Sinon, vous avez aussi des créateurs qui récupèrent des objets en tous genres et qui fabriquent d'autres choses intéressantes avec ça. Pour les 2 R suivantes de la démarche, alors on a deux possibilités selon le type de déchets, parce que là, on arrive vraiment dans ce qu'on va appeler des déchets, c'est à dire la fin de vie de l'objet ou de la matière.
On va avoir d'un côté recycler tout ce qui peut être recyclé, le verre, recyclable à l'infini, très intéressant. Le papier, le carton se recycle très bien aussi. Le plastique, si on n'a pas pu éviter ce déchet, on peut le mettre au recyclage. Le recyclage est un peu moins efficace, mais bon, voilà, déjà c'est déjà ça. Et l'autre R, ça va être rendre à la terre. Donc tout ce qui est compostable, les restes de cuisine, épluchures de légumes, de fruits, ça va bien avec tout ce qui est déchets de jardin, de tontes. Les feuilles mortes. Et là, on peut faire du compost qui peut être utilisé dans le potager pour ceux qui en ont un ou au pied des plantes pour ceux qui aiment les plantes, qui en ont.
Si vous n'avez pas de jardin, ce n'est pas grave. C'est quand même possible de composter. Ça dépend ou vous habitez, mais par exemple, dans les immeubles, de plus en plus des gens mettent en place du compostage collectif. Donc ça, c'est une chose intéressante à demander à mettre en place avec son syndic. Certains se sont aventurés aussi à essayer lombricompostage. Si vous n'avez pas peur des petits vers, ça peut être une chose à essayer. Moi, je n'ai jamais eu l'occasion de tester, mais pourquoi pas ? En tout cas, il y a des solutions pour composter, même quand on est en ville et même quand on est dans un petit appartement.
Donc on a bien retenu les 5 R : Réduire, Réutiliser, Recycler, Rendre à la terre !
Et comment est-ce que ta famille a été embarquée dans ce projet ? Comment est-ce que tes enfants, ton mari, se sont sentis concernés ? Est ce qu'ils s’en sont emparés ? Est ce qu'ils sont force de proposition ? Comment est-ce que tes enfants réagissent un peu à ces chamboulements et peut être au fait qu’ils vivent un mode de vie un peu différent que leurs camarades de classe ?
Pour les enfants, ça a été très naturel, ils étaient très jeunes, quand on a commencé, a environ trois et six ans. Donc ils ont intégré facilement ces nouvelles habitudes.
Alors il y a des choses quand même dans le vrac, quand on va acheter nos gâteaux, il y a certains gâteaux qui sont au supermarché qu'on ne trouve pas en vrac. Donc parfois, ils voient chez les copains des gâteaux différents, ils sont contents de goûter aussi des gâteaux différents chez les copains, mais qui ont des gros emballages. Mais dans l'ensemble, l'adaptation a été très très facile. Du fait de leur jeune âge, ils ont pris ses habitudes. Après, je ne dis pas, ils ont aussi envie d'avoir plein de jouets, et ceci et cela, on leur explique les choses. Et puis, pour la recherche de jouets, on regarde souvent ensemble d'occasions, on voit les possibilités qu'il y a. Et par chance, eux, ils aiment les Legos et les Playmobils et on en trouve plein d'occasions, donc ça on s’en sort vraiment bien. Du côté de mon mari, il a suivi parce qu'il a vu les mêmes documentaires que moi.
Quand il a vu que je m’emparais de la question, il n'a pu que dire oui. Après, bon, faut bien le dire, c'est moi qui ai lancé le changement, donc c'est moi qui me suis mise à faire les courses, c'est moi qui aie pris les habitudes la première. Et lui, à un moment donné aussi a dû apprendre à amener ses bocaux pour faire les courses.
Je tiens à préciser puisque j'y suis, c'est un apprentissage. Aller faire ses courses en vrac les premiers temps, ça peut être assez fatigant mentalement de penser à prendre ses contenants. Est-ce que j'ai pris assez de contenants par rapport à la quantité de courses dont j'ai besoin ? Après, on rentre à la maison, on consomme. Les bocaux on les nettoie, on les rince, les essuie, on les remet.
Il y a une logistique à acquérir, ça peut être assez fatigant au départ le zéro déchet. Je dirais qu’il faut trois mois vraiment, où on est consacré à ça et après trois mois supplémentaires, on ancre l'habitude. Après, ça devient beaucoup plus facile. Donc voilà, toute la famille s'y est mise. Avec parfois des « petits ratés » mais on ne se tient pas uniquement zéro déchet. Parfois, on a envie de sortir de ça. Il y a quelque chose qu'on aimerait consommer qui n'est pas vendable en vrac. Bon, ben, on va l'acheter et tant pis.
Donc c'est toi en quelque sorte qui a un peu tiré toute ta famille dans cette démarche, et c'est unique. Mais d’où tires-tu toute cette énergie pour une démarche de changement quand même assez importante et qui impacte tous les côtés de ta vie ?
Alors j'ai plusieurs sources de motivation.
La première et je pense qu'on va tous la partager, c'est la beauté de la planète. Quand on voit ce que Dieu a créé, quand on voit la magnificence des paysages, les océans, la diversité des créatures, on se dit « wow, c'est vraiment un trésor, je n’ai pas envie de permettre que ça s'abîme. » Et quand on a vu comme moi ces documentaires, par exemple « Plastic Ocean », qui montre tous les effets négatifs du plastique sur la vie sous-marine, sur les animaux qui en ingèrent, et même les oiseaux qui se retrouvent étouffés parce qu'ils ont mangé trop de plastique. Et ça pèse sur leur estomac, et ils peuvent plus manger normalement on se dit non, je ne veux plus de ça, ok, je faire des efforts là, le plastique, je vais le réduire. Je veux plus qu'il ait aucune chance de s'échapper de chez moi et de finir dans l'estomac d'un oiseau.
Donc voilà la beauté de la planète, c'est la première raison qui me motive. J'ai envie de contribuer à conserver ça parce que c'est vraiment précieux et magnifique.
Ensuite, je parlais du fait que j'ai vu beaucoup de documentaires et le fait d'être au courant des impacts environnementaux de nos modes de vie incite à agir. Je pense en particulier, par exemple, aux impacts de l'industrie de la mode. Quand j'ai su que la mode, c'était des impacts environnementaux. Il y a de la pollution, la culture du coton demande beaucoup d'eau, donc de l'irrigation, et une certaine gestion de l'eau, mais aussi, la mode a un impact sur mon prochain qui vit à l'autre bout du monde parce que mon prochain il est exploité soit pour coudre les vêtements, les teindre. Il fait ça dans des mauvaises conditions, mal payés, parfois au risque de sa santé, et dans le pire des cas, ce sont des enfants qui travaillent. Ça, je trouve ça inacceptable. Et là, je trouve que du coup, sachant ça, la motivation est grande de modifier nos modes de vie. Parce que c'est là qu'on se rend compte l'écart qu'il y a entre nous dans nos pays riches où on vit dans le confort, et d'autres qui en quelque sorte, sont nos esclaves, en fait, qui cousent des vêtements pour nous, parce que nous on veut changer de vêtements à chaque saison. La motivation est grande, une fois qu'on le sait. On pourrait aussi parler des conséquences du réchauffement climatique. Quand on sait toutes la dégradation et les dégâts que ça peut causer, que ce soit les crues, les sécheresses, les impacts sur la santé, les premiers réfugiés climatiques, les gens qui perdent leur pays à cause du réchauffement climatique, de multiples impacts et ceux à venir peut-être des guerres. On se dit on va essayer quand même de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour contenir ce réchauffement et éviter que la génération suivante vive des choses affreuses. Et il y a déjà des gens qui vivent des choses affreuses à cause du réchauffement climatique.
Après je nuancerais parfois, on a beau savoir, ça ne suffit pas à nous motiver parce qu'on a des incohérences et parce que parfois on préfère se voiler la face. Et ça, il faut en avoir conscience. Et moi aussi. Parfois, je vis ça. Je sais des choses et je ne suis pas aussi radicale que je voudrais l'être. Ça, c'est difficilement explicable. Mais oui, on a tous nos incohérences.
Une autre source de motivation, un peu en lien avec le fait d'être au courant des impacts de nos modes de vie. C'est le sentiment d'injustice dont je parlais tout à l'heure des gens exploités par l'industrie de la mode. Je pourrais aussi dire, depuis que je sais que les plus pauvres sont les premières victimes des conséquences du réchauffement climatique, je me dis « Mais c'est pas possible, attend les plus riches sont ceux qui sont les plus responsables et c'est les plus pauvres qui trinquent en premier. » Encore une injustice, et ça, c'est ça, ce n'est pas acceptable. Je pourrais également parler de la maltraitance animale, tout ce qu'on peut faire dans les méga fermes d'élevage bovin ou dans les élevages de poulets qui ne voient pas la lumière du jour et qui n'ont même pas 150 centimètres carrés pour vivre chacun. Tout ça pour ça que pour qu'on puisse manger de la viande à tous les repas et jeter quand on n'a plus faim. Non, non, il n'y a vraiment pas de justice. Et alors, on ne peut pas laisser passer ça. Ça, c'est vraiment une motivation.
Après une autre motivation. Alors là, on va prendre un autre angle. C'est vraiment un angle positif. C'est la perspective de construire un monde meilleur. En réfléchissant à toutes ces solutions qu'on pourrait mettre en place pour un mode de vie plus écologique. Et puis, pour contenir ce réchauffement climatique, je me plais à imaginer le village dans lequel je vis avec des nouveaux modes de vie ou les habitants du village travailleraient sur les lieux. On n'aurait quasiment plus besoin de voiture si, parce qu'il y aurait des transports en commun, parce qu'on se déplacerait à pied, à vélo. On vivrait avec les commerces qui auraient localement, on aurait plus de temps. Du coup, pour échanger avec les commerçants, on retrouverait ce lien les uns avec les autres. J'imagine aussi des légumes qui pousseraient dans les rues. On voit ça dans certaines villes avec les « Incroyables comestibles », on plante des légumes dans les rues, les gens pourraient se servir. On pourrait imaginer tout un tas de choses de ce qu'on peut faire pour rendre la vie bonne et respectueuse et retrouver ce lien les uns avec les autres. Et donc ça, c'est une bonne motivation d'imaginer ça, de s'inventer des récits encourageants.
Et bien sûr, je garderais aussi pour la fin la plus grande source de motivation, c'est l'amour pour Dieu et l'amour pour notre prochain. Ça, c'est vraiment la base de tout. Si j’aime Dieu, je ne peux pas détruire sa planète comme ça, c'est sa création. C'est lui qui a fait ça. Il a fait beau et magnifique et je veux juste me dire ce n'est pas grave, je détruis. Non, j’aime Dieu. J'ai envie de respecter ce qu'il a fait. Et si j'aime Dieu et que j'aime mon prochain, je n'ai pas envie non plus de porter atteinte à mon prochain en détruisant son environnement. Le prochain, c'est peut-être le prochain qui est proche de nous géographiquement, qui est loin. Et cela peut être le prochain qui est la prochaine génération. Donc voilà, ce sont toutes mes sources de motivation.
Pendant cette semaine de retraite, on se penche sur la résurrection de Lazare au chapitre 11 de l'Évangile selon saint Jean, pour toi, qu'est-ce que ce passage d'évangile au tombeau de Lazare, nous apprend de la réaction face à différents deuils qui amènent la crise écologique.
Si je résumais ça, je dirais « A situation dramatique, réponse de Dieu » ! En fait l'épisode de la résurrection de Lazare, elle en est un exemple spectaculaire parce que ça montre que Jésus a le pouvoir de donner la vie.
Alors aujourd'hui, la situation écologique est catastrophique à bien des niveaux. On voit l'effondrement de la biodiversité, le réchauffement climatique, les pollutions de l'air, de l'eau, des terres, l'épuisement des ressources et j'en passe. Mais on sait que Dieu fait grâce dès aujourd'hui. D'ailleurs, s’il ne nous faisait pas grâce la terre serait invivable. On ne sait pas avec certitude à quel point les écosystèmes et les sociétés humaines vont être perturbés dans les décennies à venir. Mais par contre, les différents scénarios ne sont pas très très optimistes, si on continue sur cette trajectoire et là, j'y vois un parallèle avec la maladie de Lazare.
En fait, après avoir appris que son ami est malade, Jésus reste encore deux jours à l'endroit où il se trouve, puis il décide de retourner en Judée, là où il risque d'être lapidé. À ce moment-là, quand il décide de repartir, Lazare est mort. Jésus le sait. Il annonce à ses disciples. Et là, on se dit « Mais la situation est désespérée. » Lazare est mort et retourner en Judée, c'est risquer de se faire lapider. Le parallèle, il est là. On pourrait désespérer de la même manière du gros problème du réchauffement climatique. On sait qu'il est irréversible. On peut juste le contenir à condition d'agir vite et massivement. Mais on sait que l'humanité n'est pas prête à renoncer aux énergies fossiles, entre autres.
En fait, notre situation ressemble à une impasse. Pourtant, Dieu est là. Dieu donne la vie. En fait, aujourd'hui, notre action en réponse à la crise environnementale, elle est imparfaite. Mais Dieu permet que certains déserts refleurissent. Que des initiatives jaillissent en ville pour la biodiversité, ou que des voix s'élèvent pour la justice climatique. Mais à côté de ça, on sait que nos forces humaines sont limitées et le résultat de nos actions pas toujours à la hauteur du défi. Parfois même, on peut être frustré, voire découragé. Ça m'est arrivé, je le faisais de si. Pourtant, on peut placer notre espérance dans l'action parfaite de Jésus qui donne la vie et qui prend soin de toutes ses créatures. Lui, il est capable de résoudre la crise climatique. Lui est capable de créer une biodiversité florissante et de renouveler sa création.
Si Jésus ressuscite Lazare, on peut être sûr qu'il peut restaurer la création et le faire de manière parfaite. Mais en attendant ce jour ou il restaurera tout de manière parfaite, il nous demande de le suivre et de placer notre confiance en lui. Et là, je vais citer ce qu'il a dit à Marthe, il lui a dit « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui place toute sa confiance en moi vivra même s'il meurt. »
Au cours de mon parcours de transition écologique, j'ai appris à faire confiance à Dieu pour des choses qui peuvent paraître bien matérielles, comme par exemple le volume d'une poubelle, ou alors la recherche de moyens de transport plus écologique. Mais je sais qu'il conduit notre chemin et qu'il nous donne les capacités là ou tout seul, nous sommes fragiles. En fait, il nous rend capables de modifier nos modes de vie et de renoncer à certaines choses.
Alors, bien sûr, le chemin peut être long, comme pour la sanctification. D'ailleurs, on ne peut pas tout changer en un jour. Mais soyez en sûr qu'il est, s'il est capable de redonner la vie à Lazare, il peut bien nous défaire à nous de notre addiction à la consommation et on peut vraiment lui faire confiance pour ça.
En fait, Dieu nous offre bien plus et mieux que ce que notre cœur désire. La où nos habitudes porter sur la consommation nous font désirer posséder de nouvelles choses, vivre de nouvelles expériences ou cumuler les réussites, tout ça à un prix très élevé pour la création et pour notre prochain. Dieu, lui, nous donne à voir et à vivre des choses bien plus profondes et nourrissantes.
Ça peut être, par exemple, l'amour entretenu par la communion fraternelle, la paix apportée par la contemplation d'un paysage qu'il a créé, la joie entretenue par les rires des enfants ou la satisfaction de se savoir aimé par notre Créateur et le plaisir d'en apprendre davantage sur lui en lisant sa parole. Et bien sûr, la perspective d'une création renouvelée et de la souffrance s'effacer. Voilà, ça, ce sont des bonheurs durables. C'est la vie que nous offre Dieu peut.
Il y a aussi peut-être une question qui t'a fait avancer, qui t’a mis en route, mais qui continue à soutenir ta motivation pour aller chercher le prochain petit pas ?
Alors la question qui a lancé ma transition écologique, clairement, c'est « Comment je vais réduire la quantité de déchets que je produis. À partir de là, il y a eu un effet boule de neige car j'ai découvert la multitude de choses qu'on peut changer à notre échelle, dans nos modes de vie. Après, aujourd'hui, la question un peu évoluer là, ça serait plutôt.
« Comment continuer à avancer, malgré des contraintes de plus en plus fortes liées à la structure de notre société ? » Ça, c'est une question qui me pousse à me tourner vers la force du collectif, à sensibiliser autour de moi, agir à plusieurs pour faire évoluer nos modes de vie.
Tu parles de contraintes de plus en plus forte liés aux structures de notre société, qu’est-ce que tu entends par cela ?
Je vais prendre un exemple pour illustrer ça.
La question des transports, ça peut être assez facile quand on vit en ville de se déplacer à pied, à vélo, en transports en commun, quand on vit à la campagne, c'est notre challenge et ça prend vraiment des efforts presque démesurés pour se passer de la voiture. Là, la seule solution pour agir vraiment, c'est de se tourner vers des actions collectives de type plaidoyer, plaidoyer pour qu'il y ait plus de transports en commun, des aménagements d'infrastructures, des aménagements de pistes cyclables sécurisés, etc etc. Et ça, on ne peut vraiment pas le faire seul dans son mode de vie. On est très très limité par ce qui fait la structure de notre société.
Pour terminer, est-ce qu’il y a un verset chrétien qui nourrit ton engagement, un verset de la Bible qui te parle de la manière dont Dieu est présent dans ces combats par exemple ?
C'est un verset qui parle d'écologie ou qui m'encourage au niveau écologie. Je pense à un Timothée six verset six à neuf, parce que c'est un énorme encouragement dans notre marche avec Dieu. Et c'est aussi un avertissement sur les dangers de l'attrait des richesses, de la course à la consommation. Je vais vous le lire, « La véritable foi en Dieu est en effet une source de richesse quand on sait être content avec ce qu'on a. Nous n'avons rien apporté dans ce monde et nous ne pouvons rien en emporter tant que nous avons de nourriture et bêtement, nous nous en contenterons. Ceux qui veulent à tout prix s'enrichir s'exposent eux-mêmes à la tentation et tombent dans le piège de nombreux désirs insensés et pernicieux qui précipitent les hommes dans la ruine et la perdition. »
En fait, ces versets sont bien plus écolos qu'il n'y paraît. Pour moi, ils sont tout simplement un appel à la sobriété et aussi un appel à se tourner vers Dieu plutôt que vers l'argent et les possessions. Je sais bien qu'être content avec ce que l'on a, c'est tout un défi. Mais on peut être sûr que si on trouve notre joie en Dieu, les autres choses, pallieront à côté.
Et alors là il y aura moins de risque de vouloir collectionner les voyages au bout du monde ou changer de smartphone tous les six mois, ou de rêver d'une maison flambant neuve aux dimensions disproportionnées.