Témoignage : le Dieu des vivants

"D'un seul coup, j'ai compris que Dieu était là aussi pour moi, et qu'il était vivant." Chloé

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"D'un seul coup, j'ai compris que Dieu était là aussi pour moi et qu'il était vivant, qu'il était là quoi.”


Aujourd'hui, en ce lundi de Pâques, Chloé, confirmée à l'âge adulte, va donc nous témoigner de sa conversion. Comment ça s'est passé plus concrètement, Chloé ?

Ma conversion, elle a pris beaucoup de temps, en fait, parce que j'ai été baptisée tout bébé, plus par convention sociale. Et en fait, pendant très longtemps, pour moi, Dieu, c'était le Dieu des morts. C'était celui qui gardait ma grand-mère, qui montait au ciel quand j'avais deux ans. Et donc, pour moi, c'était plutôt ce monsieur qui accueillait les morts et qui était là. Mais bon, pas grand chose à voir avec nous.

Ma famille n'est pas tellement chrétienne, pas du tout pratiquante. J'ai vraiment découvert la foi dans l'école catholique, quand j'étais en CM2. Je dis souvent que j'ai appris le Notre-Père sur les lèvres. J'ai juste regardé les gens faire et je ne comprenais rien de ce qui se passait. En fait, ça m'intriguait beaucoup.

Je me souviens qu'en CM2, quand je suis arrivée, du coup, dans l'école catholique, on pouvait rencontrer une des sœurs qui était encore présente. Et je me souviens que j'avais été la voir pour lui parler de ma peur de la mort.

Et je me souviens d'avoir été dormir chez une amie un samedi soir. Et du coup, dimanche matin, il fallait aller à la messe. Et je me souviens la voir s'agenouiller. Je lui disais « Mais qu'est-ce que tu fais ? » Elle me dit « Chut, je t'expliquerai plus tard. » Je me souviens cette messe comme l'incompréhension d'un regard très étranger, limite ethnographique, en me disant « Mais pourquoi est-ce que d'un seul coup, tout le monde se met à genoux ? » « Pourquoi est-ce que le monsieur met une coupe d'or en l'air ? »

Et je me souviens qu'avec mes yeux d'enfant, je ne comprenais pas tout. Mais il y avait quelque chose que je trouvais assez apaisant. Et j'avais l'impression qu'en fait, ces gens avaient des réponses. Qu'ils avaient sans doute quelque chose à m'apporter.

Mais la vraie conversion pour moi, elle a eu lieu sur mon premier camps d’ado Fondatio, qui est une communauté chrétienne à laquelle j'appartiens aujourd'hui. Dans un de mes premiers vrais temps de prière, j'ai entendu le Christ. Très concrètement, j'étais assise en tailleur et j'ai vu… C'était sans doute les yeux du cœur. J'ai vu Jésus à ma droite qui posait sa main sur mon genou. Et de l'autre côté, ma grand-mère. Et c'est là où j'ai entendu cette parole « Je serai toujours avec toi ».

Pour moi, ce moment, il a vraiment bouleversé ma vie. Dans le sens où d'un seul coup, je n'étais plus toute seule. Je n'étais pas seule avant, je suis entourée de gens qui m'aiment.

J'ai énormément de chance. Mais d'un seul coup, j'ai compris que Dieu était là aussi pour moi. Et qu'il était vivant, qu'il était là, quoi. D'un seul coup, il descendait du ciel.

Et à partir de là, en fait, ça a été un très lent chemin de conversion. Et notamment dans le rapport à l’Église. C'était vraiment par petits pas. J'ai d'abord fait ma première communion en 2016, donc il y a dix ans. Ça m'a mis près de cinq ans à me dire « J'ai envie de goûter au corps du Christ ».

Au départ, moi, je ne comprenais pas l'intérêt de l'Église, pour être très honnête. Je me disais « OK, Dieu est venu me parler, il est venu me chercher, mais ça me suffit. Je n'ai pas besoin de l'Église pour croire et je n'ai pas besoin des autres pour croire. » Il y avait aussi ce truc où j'aimais bien me présenter devant le prêtre et qu'il ait un geste différent pour moi. Je me disais que tous les autres, ils lui disent « le corps du Christ ». Et moi, à chaque fois, le prêtre avait une petite parole qui m'était adressée. S'il connaissait mon prénom, il me parlait personnellement. Et donc pour moi, il y avait quelque chose de beaucoup plus individualisé.

Je me disais « mais quel est l'intérêt de demander la communion, en fait ? »

Le déclic, ça a été quand j'étais aux États-Unis. J'ai fait une université d'été pendant six semaines à New York. Je me suis dit « j'ai envie d'aller vivre du gospel à Harlem. » Et en fait, cette expérience a été très forte pour moi. C'était une Église qui était particulièrement reconnue pour ses chants. Ils avaient fait une partie visiteurs et une partie pratiquants. C'était un moment hyper fort pour moi parce qu'il y avait vraiment une ségrégation qui s'opérait, parce que globalement, les touristes étaient blancs et globalement, les personnes qui fréquentaient l'Église de manière récurrente étaient noires. J'ai vraiment eu cette expérience de la séparation des couleurs de peau. Et surtout, il y avait ce truc de « mais en fait, je ne viens pas comme touriste.»

C'était très long avec les chants, etc. Donc les gens partaient un peu n'importe comment et donc c'était très peu respectueux. Et moi, j'étais là-haut, je les regardais d'en haut et je me disais « mais j'ai envie d'être avec eux, j'ai envie de communier avec eux. » Et il y avait vraiment ce truc où j'avais envie qu'on me prenne dans les bras. Je ne sais pas comment dire, il y avait vraiment ça. Et en fait, au moment de la communion, même si je savais que dans le rite protestant, le pain n'a pas la même signification que pour les catholiques, je me suis dit « je ne peux pas communier à ça, je n'ai pas été communier, je ne suis pas digne de prendre ce pain.»

Je crois que c'est à ce moment-là où j'ai compris que la communion, c'était aussi ce lieu où je pouvais être avec d'autres. Même si j'étais séparée par une barrière, je pouvais être en communion avec, en fait, toute la terre par ce petit bout de pain, par ce petit bout de corps du Christ. Et en fait, c'est en rentrant en France que je me suis dit « ok, j'en ai besoin, je ne peux plus être toute seule en tout cas.»

Et après ça, quelques années vers la confirmation…

Ma meilleure amie m'avait invitée à sa confirmation, ce qui a été un signe très fort pour moi parce qu'elle avait le droit à trois personnes. Elle a choisi d'inviter sa sœur et deux amis, donc ses parents n'étaient pas là à sa confirmation. Je me suis dit « mais le fait que je sois là, il y a une signification.» Et quand je l'ai vue, elle s'approchait et dirait « me voici », je me suis dit « mais j'ai envie d'être cette personne en fait, j'ai envie de dire me voici au Seigneur. »

C'est ça qui a déclenché le dernier sacrement que j'ai pu recevoir il y a deux ans de la confirmation.

Peut-être un mois après la confirmation, l'équipe du Catecumena m'a rappelée en me disant « ben voilà, on aimerait te proposer de devenir toi-même accompagnatrice. » T'en sors tout juste, voilà, tu sais ce que c'est d'être catéchumène. Assez rapidement, j'ai dit oui. Une des choses qui me fait le plus vivre, c'est de partager la parole de Dieu.Je ressens vraiment un feu intérieur quand on parle de la Bible, quand on parle de ce rapport à Dieu.

J'ai eu la chance d'accompagner une jeune femme qui a pu se faire baptiser là, à Pâques, et ça a été un parcours incroyable. Elle venait d'une autre religion et de voir toute son approche du christianisme, toutes ces questions qui moi m'ont beaucoup aussi fait réfléchir, de mon rapport aussi moi à la foi, mon rapport à l'Église aussi, et ça a été un vrai parcours de conversion pour moi aussi en fait.Je questionnais ce en quoi je croyais et pourquoi je croyais. Et je trouve que ça fait du bien parfois aussi de reprendre le credo, le Notre Père, c'est dire mais en fait, c'est quoi le cœur de ce qu'on dit ? Enfin, qu'est-ce qu'on dit vraiment quand on dit ça ?

J'ai eu la chance de vivre Pâques sur l'île de Lérins, avec les moines de Lérins. Enfin, un cadre magique où on passe la nuit en prière en fait. Avec le jour qui se lève, on célèbre la résurrection du Christ. Je me souviens que ce jour-là, avant du coup la veillée pascale, j'ai eu ce combat intérieur de me dire mais en fait, et si Jésus n'était pas mort ? Et je me souvenais d'un seul coup d'un documentaire que j'avais vu sur Arte avec mon père, qui essayait d'expliquer en fait Jésus, et qui disait mais en fait, Jésus n'est pas ressuscité, c'était simplement qu'il était à l'article de la mort, très blessé, et qu'en fait, c'est un des disciples qui a pris soin de lui et qui l'a guéri. Et cette pensée-là est venue m'attaquer juste avant la veillée pascale, et où là, en fait, tout s'est écroulé, où je me suis dit mais si je crois pas en la mort de Jésus, je peux pas croire en sa résurrection.

Et donc j'ai pris conscience que ma foi reposait en fait, sur cette croyance aussi qu'il est ressuscité, mais aussi qu'il est passé par la mort, et qu'il est vraiment mort. Et ça a été un vrai combat en fait, qui s'est apaisé pendant la veillée pascale. De sentir une présence qui était tellement présente… y avait plus de questions en fait.

Je laisse Dieu me guider, je sais qu'il est avec moi, et je sais que c'est vrai en fait, enfin profondément. Je peux pas remettre ça en question. Donc je pense que c'est là où j'ai compris que je croyais à la mort du Christ, et que du coup je pouvais croire à la résurrection.

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