Les révélations d’abus dans l’Église et les résultats du rapport de la Commission Indépendante sur les Abus Sexuels dans l’Église nous mettent face à l’énigme du mal, à la capacité ou non à entendre et à écouter la voix des personnes blessées, détruites car victimes d’abus et souvent non entendues, non comprises. A notre capacité à nous placer humblement à côté des personnes victimes, enfants, femmes, hommes de tous âges, à prier pour elles et avec elles, pour vous et avec vous, si vous êtes l’une d’entre elles.

Nous proposons aujourd’hui de prendre un temps pour prier. Il s’agit d’une ouverture du cœur, des yeux, des oreilles, à la plainte de celles et ceux qui portent la conséquence de ces événements tragiques pendant tant d’années ou depuis peu ou qui prochainement se réveilleront de l’emprise. Notre prière n’enlève rien à la gravité des faits, mais nous sommes en communion avec les victimes pour leur dire que nous les soutenons et pour changer nos cœurs pour devenir davantage capable d’écouter ce qu’elles ont à nous dire. Elle est un lieu pour confier à Dieu toutes les personnes impliquées, dans ces crimes, de près ou de loin, pour demander leur conversion.

Notre espérance vient du Christ, qui a regardé notre humanité en face, qui l’a prise sur lui, qui l’a accueillie. Il a ouvert un chemin de la mort à la vie. Un chemin qui doit être parcouru, au service de la Vie. Qu’au début de cette prière nous puissions nous savoir tout près de lui, qui que nous soyons, et qu’il nous aide à ouvrir ou à apaiser nos cœurs. Au Nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit. Amen.

En communion avec le cri de ceux qui souffrent, dont celles et ceux qui souffrent en silence, écoutons le psaume 12.

Combien de temps, Seigneur, vas-tu m'oublier,
combien de temps, me cacher ton visage ?
Combien de temps aurai-je l'âme en peine
et le cœur attristé chaque jour ?
Combien de temps mon ennemi sera-t-il le plus fort ?
Regarde, réponds-moi, Seigneur mon Dieu !
Donne la lumière à mes yeux,
garde-moi du sommeil de la mort ;
que l'adversaire ne crie pas : « Victoire ! »
que l'ennemi n'ait pas la joie de ma défaite !
Moi, je prends appui sur ton amour ;
que mon cœur ait la joie de ton salut !
Je chanterai le Seigneur pour le bien qu'il m'a fait.

1 « Combien de temps ? » Les témoignages d’abus ne parlent pas d’un événement isolé qu’il serait possible d’oublier. Ce sont des années de douleurs psychiques et physiques, des milliers de vies brisées. J’ouvre mon cœur à toute cette humanité, à chacune de ces personnes, à chacune de ces histoires qui est peut-être la mienne : solitude, abandon, angoisses, insomnies, estime de soi ébranlée, pensées de mort, suicides, incapacité ou difficulté à faire confiance aux autres, et même peut-être à Dieu. Je regarde avec Lui tous ces cris de détresse.

2 « Donne la lumière à mes yeux ». Humblement, je prie pour que chacun puisse réaliser ce qui est en train d’être dévoilé, victimes et membres de l’Église, religieux, prêtres et laïcs. Qu’à la lumière du Christ, chacun puisse se reconnaître digne et aimé de Dieu, et se laisse transformer par Lui. Et que notre Seigneur nous donne la force de faire ce chemin ensemble, en Église.

3 « Moi, je prends appui sur ton amour ». L’amour du Christ est là, humblement offert, pour nous redonner vie, jour après jour. Sa manière d’être présent est un « être avec », envers et malgré tout. Il ne s’impose pas, il se rend présent et disponible comme à Emmaüs. Il sait être là, écouter patiemment, compatir. A mon tour, je me confie à lui, avec mes questions, mes incompréhensions, mes angoisses, mon poids de souffrance peut-être.

Aux côtés du psalmiste, grand frère dans la foi qui passe des ténèbres à l’espérance, j’écoute à nouveau ce psaume.

Invitation à un temps de prière personnelle
A la fin de ce temps de prière, je recueille les émotions, les souvenirs, tout ce qui a habité mon cœur, même les plus douloureux. Je confie tout cela au Christ, lui demandant à quelle conversion je suis moi-même appelé pour tendre vers plus d’amour. Je prie pour que justice et paix, amour et vérité résonnent à jamais dans nos cœurs et dans l’Église pour qu’elle devienne une « maison sûre ».


Confions nous à l’intercession de Marie, qui reste au pied de la Croix avec nous dans l’Espérance.