Une œuvre d'art de Bernard Foucher
Cette croix se situe à l'orée de la Résurrection et se présente déjà comme l'après-Vendredi saint, comme un Corps conquis à la lumière du Père, prêt à la faire éprouver à tous ceux qui cherchent le Dieu des vivants.
Cette croix est d'un verre adouci par le feu et elle est transparente : elle change le soleil du visible immédiat en un regard venu de l'intérieur, le seul capable d'illuminer le monde et de lui donner déjà un avant-goût de Royaume.
Carrés et rectangles retrouvent leur douceur et leur blancheur orange et tamisée comme après un ciel d'orage et de sang. Une oblique touche un point précis à gauche du centre de la croix : elle rappelle la lance du centurion qui fait jaillir du cœur du Christ une surabondance de vie et de miséricorde. L'amour est plus grand que la mémoire des plaies ; leurs couleurs aux clartés changeantes baignent ici la surface de la croix à la manière de ruisseaux d'eaux vives chargées d'annoncer la guérison et la paix.
Regardons-y de plus près : la Croix est tout sauf un épouvantail. Elle fait circuler la lumière en nous faisant consentir à nos croix d'hommes ; elles se découpent sur l'âpreté des rouges bruns, et révèlent l'Esprit en travail dans la matière. Cette matière s'appelle « grisaille » et elle est celle que l'on employait au Moyen-Âge pour buriner les visages des vitraux. Sous la grande Croix de Jésus - et elle a l'air de nous regarder comme un visage offert tout entier à Dieu et aux autres - des croix d'hommes, plus petites et penchées, s'enracinent elles aussi dans celle du Seigneur du ciel et de la terre. Elle les irrigue et les illumine dans le secret de son éclat discret.
Suivons de plus près leurs courbes vives et leurs lignes pacifiques, elles forment à la fois un labyrinthe et un réseau : la Passion relie le ciel et la terre par des connections plus vastes et plus subtiles que tout ce que nous ne pourrons jamais imaginer. Il n'y a plus à avoir peur.
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